vendredi 29 juillet 2011

Alice au pays des merveilles - Lewis Carroll

Depuis un bon moment maintenant, voire longtemps, ce classique du merveilleux m’attirait. Impossible, lorsque l’on recherche l’étrange, de passer à côté du mythique Alice au pays des merveilles, conte séculaire (et pour une fois il n’y a aucune exagération dans le propos) qui fit grand bruit lors de sa parution en 1865. Pour que l’ouvrage traverse les âges sans sourciller, inspirant sans relâche les écrivains de chaque époque - que cela passe par le simple hommage, jusqu’à l’adaptation personnelle -, et fasse d’autres apparitions plus ou moins voilées sur d’autres support, tels que le cinéma ou la bande dessinée, c’est que le livre de Lewis Carroll, alias Charles  Ludwige Dodgson dans la vraie vie, doit posséder quelque chose en plus que les autres.


Et c’est vrai, Alice aux pays des merveilles est un conte étrange. Tant mieux puisque c’est ce que je recherchais. L’histoire, beaucoup la connaissent plus ou moins bien, mais le synopsis est certainement un des plus célèbres qui soient : Alice s’ennuie fermement lorsqu’un lapin blanc incongru déboule devant ses yeux pour pénétrer dans un terrier. Intriguée par cet animal, elle se décide à le suivre et tombe dans le dit terrier. Cette chute sera le point de départ d’un voyage éphémère mais extraordinaire, où la jeune héroïne sera confrontée à un monde loufoque, n’obéissant à aucune logique, et aux habitants tous plus déconcertants les uns que les autres.
 
Le récit est assez vite expédié. Comptez une petite poignée d’heures pour arriver au bout des douze chapitres. Ceux-ci sont assez courts, car le style de Carroll/Dodgson ne s’embarrasse pas de fioritures. Cela s’explique par le but originel de ces histoires : Carroll, dont le bégaiement la tendance à l’asociabilité l’éloignaient de ses pairs, développa une passion pour les petites filles, et notamment pour Alice Liddell, cadette des trois filles du doyen de l’établissement dans lequel il enseignait. Sa tête, encore remplie des monstres de son enfance, fut soudainement sollicitée par la petite Alice qui lui demanda de lui écrire une histoire. Sans même s’en douter, la fillette venait de pénétrer dans la légende. Et, dans une moindre mesure, ses deux autres sœurs.
 
Effectivement, les deux autres protégées de Carroll sont parfois évoquées en filigrane, à travers des chansons ou des poèmes, tous détournés ou créés de toute pièce par l’écrivain. Les références foisonnent, mais évoquent – pour celles que j’ai remarquées, grâce aux notes bienvenues de l’éditeur – pour la plupart des chansonnettes d’alors, destinées à éduquer les enfants, et ce d’une façon très moribonde pour Carroll. Donc, l’auteur s’est amusé à les détourner, à transformer d’une manière absurde ces historiettes afin de les rendre bien moins pédantes en termes d’éducation, et bien plus imaginative et récréative qu’à l’origine.
 
  Cependant, je suis peu friand de chansonnettes et de poèmes dans les œuvres, d’autant plus lorsqu’ils foisonnent autant qu’ici. C’est tout simplement que je n’arrive pas à m’immerger dans le texte. Donc, ces passages ont peu retenu mon attention. Et c’est dommage, car cela hache le rythme de l’histoire, qui d’ailleurs a tendance à fuser. Les descriptions sont réduites au minimum, préférant se concentrer sur les pensées d’Alice et sa découverte du monde. Même si l’ouvrage est court, il se passe beaucoup de choses, et ne pensez pas trop souffler pendant la lecture. D’autant qu’il faudra par moments s’accrocher pour suivre les élucubrations issues du cerveau tortueux de Lewis Carroll : toute situation est prétexte à de nouvelles facéties, qui décontenanceront n’importe qui habitué à un minimum de rationalité. Et bien qu’Alice soit la seule personne à partager notre ébahissement, on ne peut s’empêcher de se sentir par moments largué dans quelque situation encore plus singulière que les autres.
 
Effectivement, quelques scènes me paraissent aller trop loin dans le délire, tombent dans l’absurde incompréhensible – pour moi. Les propos tenus sont, à de rares occasions, tellement tarabiscotés que la compréhension relève du chemin de croix. Néanmoins, l’absurde a sa logique, et il est très rafraichissant de la voir à l’œuvre, et produire ses méfaits sur l’innocente Alice, petite fille sage modèle, qui, face à ce condensé de bizarreries, doute par moments d’être bien elle-même tant le monde fabuleux auquel elle est confrontée se moque de toutes les lois préétablies, que ce soit en matière de logique, de physique ou même d'expressions de tous les jours que l'auteur s'amuse à détourner pour notre plus grand plaisir, et qui amènent à de jolis traits d'esprits souvent très drôles.
 
Derrière tout cela se cache également une critique de l’ère victorienne, la plus explicite – car commentée par l’éditeur – étant les parodies de poèmes évoqués au-dessus. Certains personnages sont également très caricaturaux, comme la reine ou la duchesse, mais s’inscrivent 'logiquement" dans ce monde. D‘autres m’auront certainement échappées, mais une lecture plus attentive saura certainement les déceler. Un conte enfantin où se niche en filigrane une critique par l’absurde ? Certainement.
 
Bref, Alice au pays des merveilles est un conte dépaysant, même pour le lecteur d’aujourd’hui, mais qui ne m’a pas fait l’électrochoc attendu et souhaité. En cause ce rythme tronqué par les multiples parodies, mais aussi des situations parfois trop poussives. Cependant, certains passages m’ont bien fait rire, et l’imagination de Lewis Carroll assure des passages très plaisants. A lire, tout simplement, malgré une légère frustration.

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